Fréquence et gravité

Types d'intoxications

Types de toxicité

Organes végétaux incriminés

Principes actifs responsables de la toxicité


Toxicité des plantes : généralités

Fréquence et gravité

Chaque année, les centres antipoison enregistrent environ 6 % d'appels impliquant une intoxication par les végétaux. Généralement, il s'agit d'une intoxication accidentelle liée à l'ingestion par des enfants de moins de cinq ans de baies ou de fragments provenant de plantes d'appartement.
On rencontre également des intoxications consécutives à la confusion entre une plante comestible et une plante toxique.
Dans la plupart des cas, ces intoxications n'ont pas de conséquences sérieuses bien que les effets rencontrés varient selon l'individu (age, sexe, état physiologique) et en fonction des circonstances de l'intoxication (partie incriminée, moment, voie, quantité...).

Il est à noter que la toxicité réelle des baies et des plantes toxiques est souvent sujette à controverse entre différents auteurs.


Les différents types d'intoxication

Intoxication accidentelle

• Ingestion de baies ou de fragments végétaux chez l'enfant en bas age conduisant à un intoxication généralement peu grave étant donné la faible quantité ingérée.
• Confusion alimentaire entraînant une intoxication dont le pronostic peut s'avérer beaucoup plus réservé étant donné la quantité potentiellement importante de végétaux consommés (confusion entre Aconit et Navet, entre Vératre et Gentiane...).
• Liée à la projection de sève ou de suc au niveau oculaire (Caoutchouc...).
• Induite par un contact cutanéomuqueux (latex de la Chélidoine).

Intoxication volontaire

• Intoxication aiguë par empoisonnement ou suicide dont les conséquences, potentiellement très graves, varient selon la nature et la quantité de toxique ingérée.
• Intoxication chronique par abus ou mésusage répétitif d'une plante plus ou moins toxique.


Les principaux types de toxicité

Toxicité aiguë

• Toxicité digestive : nausées, vomissements, diarrhées, douleurs abdominales, coliques.
• Toxicité extradigestive : neurologique, respiratoire ou cardiovasculaire.
• Toxicité par contact cutanéomuqueux : érythème polymorphe, dermites, urticaire de contact, phytodermatose.

Toxicité chronique

• Hépatotoxicité : forme aiguë avec douleurs abdominales, nausées, vomissements, hépatomégalie et ascite ; forme subaiguë avec hépatomégalie et ascite ; forme chronique aboutissant à une cirrhose.
• L'utilisation de certaines plantes chinoise au cours de régimes amaigrissants (Aristolochia fangchi et Stephania tetrandra) peut entraîner une fibrose rénale interstitielle après 5 à 20 mois d'utilisation.


Les organes végétaux incriminés

Une plante est rarement toxique dans sa totalité. Ainsi, un organe d'un végétal peut être toxique tandis qu'un autre organe de la même plante peut être comestible. Les intoxications sont donc également dépendantes de l'organe végétal en cause.

Fruits (notamment baies)

• On rencontre deux modalités d'intoxications impliquant des baies :
- confusion avec des baies comestibles ;
- ingestion par des enfants au cours de dînettes improvisées.
Le degré de gravité de l'intoxication est fonction de la toxicité des baies, qui dépend elle-même de divers facteurs comme le degré de maturation, les conditions météorologiques, la zone géographique ou encore la nature du sol. De plus, il est souvent difficile de déterminer précisément la quantité de baies consommées.

• La toxicité varie selon la plante incriminée :
- baies très toxiques : If, Laurier-cerise, Belladone, Morelle noire, Pommier d'amour, Douce-amère, Muguet, Gui... Ces baies peuvent en cas de consommation importante entraîner des troubles respiratoires, cardiovasculaires, une altération de la conscience pouvant évoluer vers le coma, voire la mort. 
- baies toxiques entraînant des symptômes équivalents mais généralement atténués : Arum, Alkékenge, Sceau-de-Salomon, Chèvrefeuille, Nerprun, Bourdaine, Fusain...
- baies peu toxiques à troubles plus mineurs, essentiellement digestifs mais nécessitant néanmoins une surveillance pour éviter toute complication potentielle comme une déshydratation, une hypotension, des troubles du rythme ou encore une atteinte rénale : Lierre, Tamier, Marronnier d'Inde, Fragon, Troène, Sureau, Vigne vierge, Buisson ardent, Parisette, Ricin...

Racines, bulbes et rhizomes

Ces intoxications sont pratiquement toujours liées à une confusion avec une plante comestible : Gentiane et Vératre, Carotte sauvage et Ciguë, Alliacées comestibles (Oignon, Ail, Échalote) et bulbes d'Amaryllidacées (Narcisse, Jonquille)... En fonction de la quantité consommée, potentiellement importante, l'intoxication peut être sévère et toucher en outre toute une famille.

Feuilles et tiges

Les feuilles sont généralement à l'origine d'intoxications chez les enfants qui les mâchonnent mais elles peuvent également être la cause d'une confusion alimentaire (préparation de soupe à partir de feuilles de Datura).
On enregistre aussi des cas de toxicité cutanéomuqueuse, notamment avec : Lierre, Arum, Dieffenbachia et avec de nombreuses Renonculacées...

Fleurs

Les fleurs entraînent souvent des confusions alimentaires, comme entre l'Acacia et le Cytise, le Genêt à balai et le Genêt d'Espagne...

Graines

Elles induisent des intoxications lors de la consommation par des enfants mais également par confusion avec des graines comestibles ou encore par contamination accidentelle d'une récolte par des graines toxiques (récolte du sarrasin contaminée par des graines de Datura).


Les principes actifs responsables de la toxicité

Les principes actifs responsables de la toxicité sont déterminés par diverses méthodes analytiques comme la colorimétrie, la chromatographie en phase gazeuse (CPG), la chromatographie sur couche mince (CCM), la chromatographie liquide haute performance (CLHP), la spectrométrie de masse ou encore les ultraviolets. On peut ainsi envisager la toxicité d'une plante en fonction des principes actifs toxiques présents.

 
Principe toxique Plantes concernées Type de toxicité Symptômes
Ingestion faible ou moyenne Ingestion massive
Hétérosides Stéroïdiques Muguet, Fusain, Laurier-rose, Digitale, Hellébore Cardiotoxique Troubles digestifs mineurs, asthénie, agitation Troubles cardiaques et neurologiques
Génine triterpénique Bryone Purgatif drastique Diarrhées, asthénie, agitation Troubles cardiaques et neurologiques
Dérivés anthracéniques Bourdaine, Nerprun Purgatif drastique Diarrhées Déshydratation
Alcaloïdes Stéroïdiques Vératre, Buis, Douce-amère, Pommier d'amour Émétocathartique  Diarrhées, vomissements
Dérivés de phénanthridine Jonquille, Perce-neige, Chélidoine Émétocathartique Gastro-entérite
Noyau tropolone Colchique Émétocathartique Gastro-entérite Baisse des facteurs de la coagulation, aplasie médullaire, syndrome neurologique déficitaire
Diterpénique Aconit, Delphinium Cardiotoxicité Paresthésie buccolabiales, hypersalivation, troubles digestifs (signes généraux : pâleur, hypersudation, hypothermie, frissons), troubles neurologiques, cardiaques, dépression respiratoire
Dérivés quinolizidiques Genêt d'Espagne, Cytise, Lupin Poison ganglionnaire Brûlure buccale, troubles digestifs, cardiaque Convulsions, collapsus, arythmie
Taxine If Poison nerveux Moins de 3 graines : souvent asymptomatique Troubles digestifs, neurologiques, dépression respiratoire, hypotension artérielle, collapsus, asystolie
Pipéridiniques Grande ciguë Poison respiratoire Troubles digestifs, signes généraux Paralysie des muscles respiratoires,  insuffisance rénale
Dérivés tropane Belladone, Datura, Jusquiame Parasympatholytique Syndrome anticholinergique Convulsions, coma calme, dépression cardiorespiratoire
Saponosides Parisette, Tamier, Sceau-de-Salomon, Phytolacca,  Marronnier d'Inde, Chèvrefeuille, Houx, Arum, Troène, Morelle noire Irritant, hémolytique Troubles digestifs, dermite irritative Troubles cardiovasculaires, troubles neurologiques
Huiles essentielles Thuya Ocytocique, irritant Dermite irritative
Résines, latex Dieffenbachia, Poinsettia, Euphorbe Irritant Irritation buccopharyngée (voire œdème), dermite irritative, conjonctivite (voire kératite)  
Lactones Anémone, Clématite, Renoncules (famille) Vésicant Œsophagite, dépression respiratoire, dermite irritative, conjonctivite, blépharite
Oxalates de calcium Dieffenbachia, Philodendron, Yucca Irritant Inflammation buccopharyngée, dermite irritative, conjonctivite
Toxine protéique Ricin, Robinier, Ciguë vireuse, Œnanthe safranée Troubles digestifs Irritation buccopharyngée, troubles digestifs, neurologiques, dermite irritative, urticaire Convulsions, collapsus
Dérivés coumariniques Grande berce, Panais Photosensibilisation Éruptions érythémateuses 24 à 72 heures après contact avec la plante et exposition au soleil



 

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Dernière mise à jour le 23/09/2005 à 10:37:45